J4 - Vauvert - Saint-Christol
- Aline Lourtie
- 3 sept. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 nov.
Longueur de l'étape: 28 km
Total parcouru: 67 km
Je pars vers 7h. J'espère ainsi pouvoir marcher le plus longtemps possible au frais. Tout se passe plutôt bien même si la route n'est pas dingue au niveau paysages (beaucoup de routes, des industries, peu d'ombre).
Lors de ma première pause, je constate que je me suis trompée de route. Je reviens sur mes pas et retrouve le chemin. Quelques kilomètres plus loin, je me perds à nouveau. Je passe plus d'une heure à tourner en rond, à chercher une route indiquée sur la carte mais qui n'existe pas dans la réalité. Je finis par retombée sur le bon chemin. J'ai perdu du temps et cela m'a fatiguée et stressée.

J'arrive à Gallargue. J'en profite pour acheter de l'eau et faire ma pause repas dans un parc, à l'ombre des arbres. Je n'ai vraiment pas faim. Pourtant, ce matin, je n'ai mangé qu'une barre de céréales. Je me force à manger un peu. Cela passe difficilement. Puis, je fais une petite sieste. Je suis réveillée par un bruit familier : celui des bâtons de pélerin sur la route. Je vois un pélerin qui se dirige vers le magasin. Je décide de lui laisser prendre de l'avance avant de me remettre en route. Je n'ai pas spécialement envie de marcher avec quelqu'un.
Je le croise quelques kilomètres plus loin. Il est en train de faire une pause. Je lui dis bonjour et continue ma route. Je vois qu'il range ses affaires et il me rejoint. Il commence à me parler en anglais. Je ne suis pas spécialement ravie qu'il m'accompagne mais je tente l'expérience. C'est ça aussi le Chemin. Le fait de devoir parler anglais est une difficulté pour moi. Cela me demande beaucoup de concentration et cela me fatigue en plus de la marche. Son rythme est plus rapide que le mien. Il est allemand. Il me raconte qu'il est parti d'Allemagne avec un ami. Ils sont passés par l'Italie (Pise, les Alpilles, les Dolomites) puis par Nice et Monaco. A Monaco, son ami est parti vers Alicante tandis que lui a rejoint la Voie d'Arles. Cela fait 48 jours qu'il marche et il fait le chemin en autonomie complète. Je suis très impressionnée.
Au début, je trouve cela sympa de marcher à deux même si nous ne parlons pas beaucoup. J'ai l'impression d'être moins focalisée sur mes petits bobos. Puis, je me rends compte que cela ne me convient pas. Je ne peux pas me poser autant que je veux, le rythme n'est pas le mien. Je ne m'arrête plus pour contempler les paysages et prendre des photos .

Dans le village de Vérargues, nous avons du mal à trouver le bon chemin et nous tournons en rond. Nous sommes en train de revenir sur nos pas quand un monsieur nous accoste et nous propose de nous accompagner pour nous montrer le chemin car Le Camino passe juste devant chez lui. Il m'explique ensuite comment prendre un raccourci. Nous nous disons au revoir. Quelques mètres plus loin, il nous rejoint à vélo. Il voulait juste s'assurer que nous ne nous étions pas perdus. Je trouve cela adorable. C'est la magie du Chemin.
A partir de ce moment-là, je commence à souffrir de la chaleur et j'ai du mal à suivre le rythme. C'est difficile. J'ai l'impression que la route n'en finit pas. Le fait d'être accompagnée commence à m'agacer. Je n'ai plus envie de parler ni d'écouter. Le bruit de ses bâtons m'exaspère. J'ai hâte d'être à Saint-Christol et j'espère qu'il va continuer sa route au-delà étant donné qu'il fait de plus longues étapes que moi. Quand je lui explique que je n'irai pas plus loin que Saint-Christol car j'ai trouvé un logement là-bas pour 10€, il hésite à venir au gite avec moi. Finalement, il décide de continuer à marcher. Ouf !
Les derniers mètres jusqu'au gite communal sont pénibles. C'est une vraie épreuve. Je suis au bout du rouleau. J'arrive devant la commune qui vient juste de fermer. Je dois donc appeler l'un des bénévoles pour qu'il vienne ouvrir le gite. Il me dit qu'il sera là dans 15 minutes. Je suis un peu désespérée. J'avais hâte d'arriver, de me poser, d'enlever mes chaussures, de boire et de m'allonger un peu. J'attends, assise sur les marches devant la mairie.

Je vois André arriver en voiture. Il se gare un peu plus loin et il me fait signe de le rejoindre. A peine 100 mètres nous séparent et j'ai la sensation que c'est le bout du monde. André m'accueille avec un sourire jusqu'aux oreilles. Il est très enthousiaste. Il me raconte qu'il a fait la Voie du Puy il y a une dizaine d'années et que cette expérience l'a transformé. J'aimerais pouvoir discuter davantage avec lui mais je suis épuisée et je ne profite pas de ce moment. Je suis un peu découragée quand je vois le tout petit dortoir et surtout d'apprendre que nous serons deux à dormir là. J'aurai tellement aimé être seule.
Mon compagnon de chambre s'appelle Viktor. Il est Ukrainien. Il ne parle pas bien anglais ni français. Et moi, je suis trop fatiguée pour parler anglais. La conversation étant limitée, nous restons chacun de notre côté : lui dans la cuisine et moi dans le dortoir. Cela me convient. Je me sens triste et découragée. Je pleure. Je donne des nouvelles à la famille en leur faisant part de mon état. Cela me fait du bien d'avoir du soutien. Je ne me sens pas bien. J'ai besoin de rester allongée. Je n'ai toujours pas faim. Je me repose un peu avant d'aller prendre ma douche. Je me force à manger quelques fruits secs qui ont du mal à passer. Je me couche juste après.
Je laisse la lumière allumée pour que Viktor puisse s'installer même si je dors déjà. Je l'entends entrer dans la chambre un peu plus tard. Il prend un matelas, ses affaires, il éteind la lumière et il s'installe dans la cuisine pour dormir. Je ne sais pas pourquoi il a fait ça mais je le remercie intérieurement. J'ai du mal à m'endormir. Il fait chaud et je manque d'air dans cette petite chambre. J'ouvre la fenêtre pour respirer un peu. Cela m'aide à m'endormir.
Aline Lourtie
04 septembre 2023



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